Face à la pénurie annoncée de professeurs à la rentrée 2022, Pap Ndiaye a assuré qu’il y aura un « professeur devant chaque classe dans toutes les écoles de France ». Les derniers chiffrent révèlent pourtant que les postes d’enseignants ne sont pas tous pourvus après les résultats des concours.
[Mise à jour du 8 juillet 2022 à 8h14]. A la rentrée de septembre, le nombre d’enseignants manquants devrait être criant selon les syndicats. Pour autant, le ministre de l’Education nationale se veut rassurant à ce sujet. « Il y aura un professeur devant chaque classe dans toutes les écoles de France. Nous faisons ce qu’il faut pour (…) Nous avons un problème de recrutement, un problème ancien mais qui s’est aggravé ces dernières années, avec cette questions des rémunérations, qui ne sont objectivement pas à la hauteur de ce que l’on peut attendre« , a expliqué assure Pap Ndiaye ce 7 juillet 2022 sur France Inter.
Le concours d’enseignants manque de candidats
Si tous les candidats aux concours classiques n’ont pas été retenus pour devenir professeur ou enseignant, encore faut-il que le métier suscite encore des ambitions de carrière. Et face au manque d’attractivité du professorat, la baisse du nombre de postulants aux concours de l’enseignement est criant, preuve que le métier attire beaucoup moins la jeune génération. Selon un communiqué de l’Education nationale publié ce 7 juillet, 9 951 postes de professeurs des écoles étaient proposés aux différents concours de l’enseignement public et 8 265 candidats ont été admis. Au niveau national, le taux de postes pourvus dans le premier degré est donc de 83,1% alors qu’il était de 94,7% en 2021. Dans le second degré, 13 620 postes proposés étaient offerts (12 730 postes d’enseignants, 640 postes de conseillers principaux d’éducation et 250 de psychologues de l’Éducation nationale) et 11 353 candidats ont été admis au concours. Au niveau national, le taux de couverture (hors listes complémentaires) pour le second degré est donc de 83,4% alors qu’il était de 94,1% en 2021.
Certaines disciplines sont plus concernées que d’autres. Ainsi, en histoire-géographie, espagnol, SVT ou éducation physique et sportive, tous les postes ouverts sont pourvus. En anglais, 91,4% des postes seront pourvus contre 88 à 100 % durant les trois années précédentes. En revanche, certaines disciplines sont sous tension cette année ; c’est le cas des lettres classiques où 57% des postes sont pourvus pour 57,5 à 62% durant les trois années précédentes et de l’allemand, où 55% des postes sont pourvus contre 70 à 81% durant les trois années précédentes. D’autres disciplines présentent des taux d’admission également insuffisants en 2022. C’est le cas de la physique-chimie où 66,7% des postes sont pourvus contre 80 à 100% durant les trois années précédentes, des mathématiques où 68,5% des postes sont pourvus contre 84 à 92% durant les trois années précédentes et des lettres modernes où 83,5% des postes sont pourvus contre 98 à 100% les trois années précédentes. L’Education nationale précise cependant que le recrutement d’enseignants contractuels, déjà en vigueur dans le second degré, devrait permettre de compenser ces problèmes dans certaines disciplines. Une crise de vocation qu’il est cependant urgent de pallier pour certaines académies, qui passent désormais par des méthodes de recrutement à mille lieues du protocole institutionnel.
Un système de compensation entre collègues ?
Face à ce manque inquiétant de professeurs, Pap Ndiaye a proposé ce 25 juin un système de compensations des heures entre collègues. « Nous voulons faire en sorte qu’une absence du professeur d’histoire-géographie par exemple soit compensée par, disons, son collègue de français. Mais attention, pas pour que le professeur de français fasse de l’histoire-géographie ! Il utilisera ces heures pour faire une double dose de français, et quand le collègue d’histoire-géo reviendra, il compensera en prenant sur les heures de français« , a expliqué le ministre de l’Education nationale dans le Parisien. Une proposition qui ne convainc pas du tout les syndicats comme le SNUEP-FSU, qui représente les professeurs de l’enseignement professionnel public, qui aimerait que l’Education nationale recrute plutôt que de surcharger les professeurs en poste.
En quoi consiste le libre-recrutement des professeurs ?
A Marseille, où s’est rendu le 2 juin 2022 le ministre de l’Education nationale Pap Ndiaye, c’est le libre-recrutement des professeurs par les établissements eux-mêmes qui est expérimenté. Là encore, cette méthode de recrutement ne convainc guère. La CGT Éduc’Action y voit une manière d’opacifier tout un système en favorisant le clientélisme, et de territorialiser l’école. De fait, les communes les plus riches pourraient se payer les meilleurs profs, entraînant inégalités scolaires et sociales.
Seuls 22% des enseignants recommanderaient leur métier à un jeune
Fatigue, colère, déprime, résignation, isolement… Voici les termes qui ressortent lorsque les enseignants abordent leur métier et leur état d’esprit. Après plusieurs années ponctuées par le Covid-19, les professeurs ont dû tant bien que mal s’adapter aux différents protocoles sanitaires, sans ressentir de véritable reconnaissance et de respect dans leur pratique professionnelle. Selon une étude publiée ce 23 mai et menée par le syndicat Unsa Education auprès de 42 836 enseignants, seulement 22% d’entre eux recommanderaient leur métier à un jeune. Mais cela ne signifie pas qu’ils n’apprécient pas leur métier : ils sont en effet 92% à aimer la profession. Pour autant, « 29% ne trouvent plus de sens à leur mission, et 38% se disent prêts à changer de métier vers le public, et 29% vers le privé » précise l’étude. Ce qu’il faudrait améliorer selon eux ? Le pouvoir d’achat pour 68% des sondés, la charge de travail (45%), les perpectives de carrière (41%) ou encore les relations hiérarchiques (23%). Enfin, 87% sont en désaccord avec les choix politiques et 9 enseignants sur 10 estiment qu’ils sont trop peu rémunérés.