À Paris, Shein anticipe la Fashion Week avec un défilé sur la Seine. Ce géant de la fast fashion à la chaîne de production contestée serait-il un accélérateur de carrière pour les jeunes créateurs de mode ?
Un bateau-mouche sur la Seine, la Tour Eiffel, le pont Alexandre III, le Grand Palais et du soleil. Peut-on rêver meilleur décor pour un défilé de mode ? En front row du défilé organisé par Shein, géant chinois de la fast fashion, des stars de télé-réalité et des influenceurs du monde entier. Et c’est bercées par les ondes de la Seine que les mannequins ont foulé un podium blanc immaculé.

Leurs tenues ? Elles étaient signées par 25 stylistes prometteurs sélectionnés un peu partout en Europe (France, Royaume-Uni, Espagne, Italie…) par Shein et offrait un mélange de styles inattendu : imprimés léopard, traînes, bijoux de visage, cagoules, guêtres… Des créations portées par une cabine inclusive, escortée mannequin après mannequin par les auteurs de ces vêtements lors du salut final.
En bref, ce défilé, qui est le premier organisé dans le cadre de Shein X, le programme de collaboration du pure-player chinois avec des créateurs, était une réussite. Pourtant, à l’origine, Shein, c’est la marque de l’ultra fast fashion par excellence. Créée à Nankin, dans la province du Jiangsu, elle propose un catalogue en ligne de vêtements à mini prix, dans lequel on retrouve toutes les tendances mode du moment. Si la marque est souvent épinglée dans les médias, c’est parce qu’elle encourage à la surconsommation en proposant, selon un reportage de TF1 pour « Sept à Huit », diffusé en avril 2022, jusqu’à 10 000 nouveaux produits chaque jour. Les journalistes de l’émission ont eu accès à une usine cantonaise qui produit les collections de la marque et y ont constaté des conditions de travail illégales avec 75 heures d’activité par semaine et un jour de congé par mois. Les jeunes créateurs du monde entier s’élèvent eux aussi contre Shein lorsque l’entreprise copie, parfois à l’identique, leur travail. La griffe française MaisonCléo en a par exemple fait les frais. Alors, est-ce qu’offrir une vitrine à 25 designers en devenir serait un premier pas vers un futur plus éthique pour la marque chinoise ? À voir.

Être repéré par Shein, qu’est-ce que ça signifie ?
Ce qui est sûr, c’est que pour Oxana (@oxanagoralczyk) et Maïmouna (@unhuitmars), deux des stylistes françaises qui ont participé à l’événement, le show Shein X Feel Da Vibe est un véritable tremplin. Fraîchement diplômées de leurs écoles de mode respectives, elles bénéficient grâce à ce défilé d’une exposition dont elles n’auraient pas osé rêver. « J’ai été repérée grâce à mon compte Instagram de croquis très suivi [elle a 102 000 followers, NDLR]. Au début, je n’y croyais pas. On me donnait enfin la chance de créer et vendre mes créations au grand public. Grâce à Shein, j’ai pu développer mon univers mélangeant haute couture, costumes d’époque chic à la française et modernité », explique la créatrice. Pour Maïmouna (@unhuitmars), sélectionnée lors d’un concours : « Ce partenariat était l’occasion d’avoir une liberté totale de création puisque c’est de façon autonome que nous travaillons avec la marque. On dessine nos silhouettes, puis on les envoie à Shein qui s’occupe de les fabriquer et de les mettre en ligne. » Oxana abonde dans son sens et ajoute : « Ce que l’on gagne à travailler avec un géant comme Shein, c’est surtout de la visibilité. Nos créations peuvent être achetées partout dans le monde ! Et puis, on est aussi aussi rémunéré puisqu’on touche une commission sur la vente de nos articles. » Des créations à retrouver, avec celles des autres participants, sur le site de Shein dans la rubrique Shein X Feel Da Vibe.